Fourth Day

Comment le Slow Media émerge face à l’infobésité

Autrefois, s’informer signifiait s’asseoir avec une édition imprimée d’un journal et feuilleter de la couverture à l’arrière. Aujourd’hui, avec les chaînes d’information en continu et les médias sociaux, la manière dont les informations sont partagées et consommées a complètement changé.

Selon un rapport de l’Ofcom, 51 % des 16-24 ans déclarent qu’ils obtiennent la plupart de leurs informations des médias sociaux. Nos flux Twitter et Facebook sont remplis de nouvelles, qui sont partagées des millions de fois dès qu’elles sont diffusées. Et comme la durée moyenne d’attention d’un individu n’est plus que de huit secondes, la surcharge d’informations nous empêche de voir quand des informations erronées sont partagées et de réfléchir réellement à ce que nous lisons.

En réponse au rythme effréné du cycle d’information actuel, un nouveau mouvement journalistique est en train d’émerger. Le concept de Slow Media est né du désir d’éviter la surconsommation et de se concentrer sur un contenu long et réfléchi, plus analytique, plutôt que de simplement rapporter ce qui s’est passé.

Notre collègue Danny s’est entretenu avec deux journalistes qui changent la façon dont l’information est rapportée – Liz Moseley, rédactrice en chef de Tortoise Media, et Joshi Herrmann, fondateur de The Mill – pour en savoir plus sur cette tendance croissante.

Une information plus lente et plus consciente

La recherche d’une forme d’information plus lente a vu naître un certain nombre de publications au cours des dernières années. Tortoise Media, qui a été lancé avec une campagne Kickstarter il y a deux ans, compte aujourd’hui près de 50 000 membres. L’équipe de Tortoise Media explique d’ailleurs qu’elle est en train de bâtir « une autre forme de salle de rédaction, pour une information plus lente et plus consciente. »

Le changement dans la manière de présenter les informations est en partie à l’origine de cette évolution. Liz Moseley, rédactrice en chef, déclare : « Nos cofondateurs ont passé leur carrière dans le secteur de l’information – au FT, à la BBC et dans d’autres sociétés d’information. Ils ont observé de grands changements dans le reportage et la consommation d’informations, ce qui a eu pour conséquence que les salles de rédaction courent après l’information mais manquent d’éléments pour la traiter en profondeur. »

Pour fournir des nouvelles que les gens veulent lire, Tortoise se concentre sur ses membres et sur la façon dont elle peut leur fournir les meilleures informations. Comme l’explique Liz, « Nos membres ont un sentiment de responsabilité envers Tortoise. Ils nous tiennent pour responsables de faire du bon travail, parce que souvent ils le font avec nous. »

Approfondir les sujets locaux

D’autres visent à offrir ce style journalistique plus réfléchi au niveau régional. Lancé par Joshi Herrmann en mai 2020, The Mill offre aux lecteurs du Grand Manchester un journalisme approfondi sur les questions locales qui leur tiennent à cœur, en mettant l’accent sur la qualité plutôt que sur la quantité.

Joshi Herrmann dit avoir constaté que l’industrie a connu d’énormes difficultés économiques ces dernières années, les modèles traditionnels de journalisme ayant été détruits par l’internet. « Cela a été particulièrement préjudiciable pour les journaux locaux et régionaux, dont beaucoup ne sont plus reconnaissables dans le type d’articles qu’ils publient », dit-il. « La plupart des reporters ont disparu, et les salles de rédaction ont été dépouillées »

Il souligne que Manchester, en particulier, était autrefois une grande ville d’information avec plusieurs grands journaux et a perdu beaucoup de talents journalistiques au fil des ans. L’histoire est la même dans de nombreuses autres villes du Royaume-Uni. En France aussi d’ailleurs.

Mais la recherche d’informations locales plus approfondies revient. Alors que The Mill n’en est qu’à ses débuts, Joshi dit avoir déjà inscrit 5 000 personnes à la liste de diffusion et 450 abonnés payants, deux semaines seulement après avoir lancé les adhésions payantes. Un nombre phénoménal de journalistes lui ont également envoyé des courriels pour lui demander de contribuer, notamment des écrivains qui ont contribué au Guardian et au New York Times.

Publicité – l’épine dans le pied.

Le nombre de publicités et de fenêtres contextuelles auxquelles vous êtes confronté peut parfois rendre votre expérience sur Internet compliquée. Qui n’a pas déjà eu à faire face à des formulaires assez intrusifs pour lire un article dans son intégralité ?

Cela est une source de revenus importante pour les sites d’information en ligne. Alors comment les Slow Medias comme Tortoise et The Mill, qui veulent rester indépendants et sans publicité, gèrent-ils leurs modèles d’entreprise ?

Eh bien, toutes deux ont été créées et sont financées par leurs membres, plutôt que par les annonceurs. En plus des frais d’abonnement, les deux publications invitent les membres à contribuer à leurs réflexions. Tortoise organise quotidiennement des conférences de presse « ThinkIn », qui mettent en relation les journalistes et les membres. Selon Liz Moseley, cela signifie que « nous ne nous tournons pas toujours vers l’actualité existante pour savoir ce qui mérite une enquête plus approfondie. »

Le désir d’une information lente s’est accéléré ces dernières années, mais nous suivrons avec intérêt l’évolution de cette tendance et nous espérons qu’elle se poursuivra et même s’amplifiera. Du point de vue des relations publiques, il sera très intéressant de voir l’impact que cela aura sur la façon dont les agences RP devront communiquer.

The author

Cindy est consultante RP senior au sein de Quatrième Jour. Elle est également responsable de notre agence de Casablanca.

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